Sans attendre la quille, Je sors de ma coquille
C'est au coeur de la ville, La vie civile
Désertant la caserne Qui me gouverne
Que nos soldes sont bues. avec en vue
Pour flâner dans la rue Avec d'autre recrues
Les bourgeoises enchantées De se désargenter,
Dans nos manteaux d'hiver, Papillons verts.
D'aller faire les boutiques, Papillons chics...
Les papillons... Les papillons...
Le diable nous emporte Avec les feuilles mortes
Au grand bal des fantômes Papillons jaunes
Ou dans quelque manège Sous les flocons de neige,
Angéliques et mouillants, Papillons blancs.
La cigarette au bec,
Je poursuis ma cueillette
En regardant descendre
Un papillon de cendres
Dans l'anonymat
D'une salle de cinéma
Parmi d'autre poussières
En habit de lumière...
Les papillons... Les papillons...
Dire que mes vingt ans,
Je les passe à tuer le temps
Sans connaître la gloire
D'être un seul soir
Un as de la voltige,
Matador de vingt piges,
Un coquelicot qui bouge,
Papillons rouges.
Moi, c'est grisé d'alcool
Que je prends mon envol
Dans la rue vers minuit,
Papillons gris.
La Lune les libère
Et, sous les réverbères,
Ce sont les noctambules
Qui déambulent...
Les papillons... Les papillons...
Parfois, parmi le nombre
On voit une ombre
Qui fait parler ses yeux,
Papillons bleus
Mais on n'écoute rien:
On pense à autre chose
Quand ses lèvres nous causent,
Papillons roses
Et parfois, on la suit,
Sous son grand parapluie
Mais son prénom nous fuit,
Papillons de nuit
Et quand, le lendemain,
Il reste sur la main
L'ombre de son parfum,
Tout un jardin,
Elle est déjà loin.
Elle n'est plus qu'un point
Et c'est le désespoir
Papillons noirs...
Car sur le guéridon,
Griffonné au crayon,
Il reste un papillon:
"Adieu Léon".
Les papillons... Les papillons...